Bienvenue chez Philox & Jef Rossi

Chansons en secret

1 - Fondamentaux

Il nous faudrait des lieux sûrs, des lieux secrets, pour nous rendre en des lieux imaginaires interdits, des espaces non répertoriés par le cadastre culturel ou cultuel, des non-lieux, des utopies, des lieux où la sorcellerie comme la magie puissent reprendre ses droits.
Il nous faudrait donc débrancher tous nos mouchards
-et ils sont nombreux- jeter tous nos programmes, nos répertoires, nos flyers, nos affiches avec logos de bon droit qui mettent le vernis sur toute épreuve, tout essai, toute tentative d’aller…
Il nous faudrait même fermer les volets, mettre des tentures et débrancher toutes les mises en espaces, toutes les représentations !!!
Retrouver les espaces nomades, les chemins intermédiaires, les interstices. Disloquer les trônes, les scènes, les pouvoirs !

2 - Déminages politiques

Il y aurait comme un pont d’or entre le culte du moi et le pouvoir ancestral régulé en deux points zéro…
La massification des spectacles, des films, des expositions et musées n’a de cesse de nous ensevelir dans sa logique de selfies, de réseaux, de mitraillages photographiques non-stop, de revues, d’obligation de fêtes, de festivals et d’événements immanquables. Il nous faut toujours être en pleine vivacité, et encore faut-il que cette vivacité soit celle indiquée par les donneurs de médication culturelle.
Les artistes et communicants (et il faudrait y inclure les sportifs et les religieux) sont ces nouveaux aristocrates devant lesquels les publics viennent s’agenouiller pour des séries d’adoubement permanent. Telle est la foi du spectacle qu’il nous faut déminer avant d’envisager de possibles Etats Généraux de la société des loisirs…

3 - Du jour où nous disparaitrons

Où nous nous en fûmes, nul ne vint nous chercher…Nous avions trouvé refuge au fin fond des landes perdues au plus loin du paysage, tellement l’idée même de ce monde nous faisait vomir…
Nous nous blottissions entre nos bras pour avoir chaud la nuit et les daims, comme les cloportes venaient nous renifler. Personne ne serait porté disparu, puisque nos apparitions n’avaient compté que pour si peu.
Nous n’étions que des codes-barres attachés à des consommateurs, des citoyens lambda, des salariés machins. Et les quelques êtres chers finiraient rapidement par se lasser de nous chercher.

4 - Chanson naufrage

Bateau échoué parmi les remugles du pays d’abandon !
Chansons oubliées dans la cale par milliers, sur la grève pour plusieurs éternités. Rebonds, rebonds, rebonds du ballon parti danser sur le flot.
Nuit des vagues absorbantes où les grands commerces finissent net. Grands paquebots enfouis qui laissent l’oiseau libre au-delà des masses.
Rouerie du caméléon sur la viande inerte des foules. Chanson légère comme la fumée qui l’enveloppe dans le désert des factices et des circuits intégristes.

5 - Pierres de rêve

L’idée qu’à chaque pierre retournée, l’instant magique puisse surgir et nous irradie de son autre rêve.
Nous arrivons dans ces grands champs-là, remplis de pierre, en friche depuis longtemps. Quelquefois, la pierre est vide.
Peut-être l’est-elle réellement… Peut-être nos yeux ne sont pas prêts…
Il faut du muscle, et encore du muscle pour les retourner toutes, ces merveilles. Ce sont des musées à ciel ouvert où il pleut presque toujours. Ce sont des pierres de rêve luisant dans la terre fraîche des matins. Et nous n’avons qu’à nous baisser pour ramasser la beauté !

6 - Origines du rêve

Quel bon vent vous amène ? Quelle sorte de sortilège vous enroule dans l’escargotesque couloir qui fait que là, vous êtes là ?
Mais est-ce bien vous ? Vous n’avez rien oublié à votre maison ? A moins que ce ne soit une autre vie ? Quand nous sommes nous vus la dernière fois, c’était dans cette vie-ci ou dans cette vie-là ?
Et mes rêves, mes beaux rêves bleus qui parfois frôlent le violet des ultras, vous n’y seriez pas allez faire un tour ? Une petite balade noctambule ? Une petite pénétration dans mon cockpit avant, avant d’aller vous recoucher, comme si de rien n’était ?
Ou alors, c’est dans les silences, cette belle forêt d’épaisse Amazonie ? Vous ai-je aperçu entre deux arbres ? Avons-nous bu le thé entre deux lianes ? Sans nous douter que nous rêvions et que comme dans le miroir, cette vie qui se regarde n’était pas plus vraie que l’autre ?
La vérité se trouve-t-elle dans les odeurs que nous laissons, longtemps après notre passage ? Et que restera-t-il du cortège d’idées et de sentiments qui nous avait secoués dans le secret de nos alcôves partagés pendant plusieurs éternités ?
Du vent ? Ce bon vent qui nous amène ce soir ? Mais pourquoi cette poudre qui danse entre deux faisceaux de lumière, devant vos beaux yeux éveillés ?

7 - Métamorphose du DVD

Dire que nous n’osions même plus le solliciter. Tellement l’hyperactif était le modèle rédhibitoire. Nous voulons dormir car nous voulons vivre. Alors éteindre tous les postes, toutes les bouches à cris d’ostentation et tenter de les effacer de ses murs internes…
Etre une chose. Regarder les boites, les pots, les galets, les sables, les oranges. Et observer leurs miracles. Pause.
Pose. Voir la perfection dans laquelle les objets posent. Miracle de leur poids. Sagesse de leurs épousailles avec le sol, avec le fond, avec le plein ! Avec le vide ! Etre la porte ! Etre la clef !
Idem pour la plante. Etre un arbre, un grand très étiré dans les étoiles. Ou même une pomme de terre, une carotte, un chou, une rose… Sentir son étirement vers la terre… Ses yeux intérieurs ouverts en grand sur les cieux… Et son eau, sa lumière ! Etre dans la perfection des matières qui gouvernent. Etre l’eau. Etre le nuage.
Dire nous voulons dormir sans interrompre sa méditation sur les chats, les chiens, les singes, les fauves et tous les petits animaux dont le dormir est la base permanente, le socle de neutralité, le retour à son origine sans laquelle tout cheminement devient impossible, voire aussi vain que terrifiant.
Tous ces êtres que la parole a épargnés et qui nous scrutent de leurs grands yeux éveillés.
Tous les hommes que tu as connus, te disaient qu’ils ne voulaient plus déposer toutes les cartes comme une défaite, c’est dur de retenir la main d’un homme qui cherche si loin, qui veut atteindre le ciel pour se livrer.

8 - Métamorphose de l’ange

Tous les hommes que tu as connus te disaient qu’ils ne voulaient plus déposer toutes les cartes comme une défaite. C’est dur de retenir la main d’un homme qui cherche plus loin, qui veut atteindre le ciel pour se livrer…
Que tu étais haut dans la fleur de l’ange!!!
Que tu étais loin dans la fleur de l’ange !!!
Autant vierge effarouché aux yeux de biche profonds, mais aussi jolis biscotos comme tes membres et rêves gonflés ! Tout indiquait le port de tête hautain, la matité de ta peau, ces grandes lignes des hauts plateaux qui nous portaient aux siècles des lumières ou des ombres guerrières…
Une espèce de seigneur à cheval fougueux dans la beauté sauvage de ton enfance transcendée, virevoltant avec ce plateau de bières très ambrées et la maturité de ton âge épanoui et secret ! Jouant du bon petit diable, du haut de ta coquinerie légendaire certes, mais tellement aussi retranché dans ta réserve naturelle que tu pus paraitre autant affable, autant maussade à la face du client ordinaire !
Et que je t’épiais depuis l’enfer de mes lunettes, tout en chiffonnant les nouvelles du jour comme d’infinis hiéroglyphes qui n’étaient rien en comparaison de la prunelle saillante que tu savais pouvoir éteindre ou magnifier à discrétion, selon l’ordre des voyageurs tout droits sortis des gares !
Et comme tu nous comblais lorsque tu accueillais avec distance, voire une pincée de froideur comme en tant que bon serviteur professionnel éclairé de nos latitudes touristiques ! Puis l’instant d’après, tu pouvais aussi te confier d’un simple regard complice et troublé…

9 - Don du souffle donné

Bien que « je ne voulais pas naître et que je vous avais rien demandé » comme je le chantais autrefois, quelque chose m’avait réveillé dans le tréfonds des poussières.
Quelque chose s’est donné de ces deux êtres qui fît que ma vie fut appelée. Oui, la vie se donne. Oui, mes atomes furent touchés par ce don.
Qu’est-ce qui fit pour que du bout de son plumeau, le plaisir coula assez de l’un pour féconder l’autre, pour donner la vie ? Qu’est-ce qui fit que cet être qui tient aujourd’hui la plume de pensée, accepta l’éveil à la vie ?
Qu’est-ce qui put réunir deux êtres à me donner le souffle ?

10 - Don quand nous n’étions que des bouches

D’où me vient donc qu’au départ nous ne fûmes que des bouches ? Je dis : nous, au nom de tous ceux qui habitèrent en moi et qui pour certains n’ont pas délogé.
Des bouches pleines de dents ; les yeux sont forcément très petits ; à peine perceptibles. Toutes ces bouches à nourrir dont j’avais la pleine conscience, petit, à table avec mes frères et sœurs, au cœur des repas rituels, dans l’angoisse toujours renouvelée de ce que pourrait bien donner la table du lendemain…
Et ces chiffres, l’horreur de tous ces signes qui ne cessaient de danser dans les nuits incertaines. Nos bouches avant toute parole étaient cauchemars.

11 - Don de la main

S’occuper à naître chaque jour, c’est regarder les étoiles qui vivent à son domicile. Comme on dirait, au creux de sa main. Mais pas sa main seule…
La main qui embrasse comme celle qui étreint, qui palpe, qui caresse, qui cherche et scrute, qui prend, qui donne !
Tous les animaux savent cela par cœur avec peut-être la différence de la main. Les animaux avec leurs yeux naissent. Avec leurs poils, avec leurs écailles, avec leurs ailes.
Nous, naissons de par nos mains. C’est elles qui inventent les chemins. Chaque jour, la caresse trace les bords de la piste.

12 - Don de nos instants préférés

Les moments de l’amour sont presque à tous les coups ceux que nous préférons de nos vies brèves parce qu’enfin nous nous sentons entiers, pleinement unis et pleinement dans l’instant.
Et puis nos sexes sont magnifiques. Et qui nous le dira sinon l’écoute affutée de ces moments… C’est le bonheur qui coule parce qu’enfin on l’entend couler. Disons qu’il nous est permis d’entendre ce hurlement, là où le vent y est pour beaucoup.
Puis les quelques secondes qui suivent. Ces quelques fruits tout aussi délicieux ! Puis le retour de l’ordinaire où nous est donnée l’obligation de mûrir dans le soleil de ces magies…

13 - Don de la honte

La honte qui me fut livrée fut cette boue qui nous est transmise de génération en génération à travers les petits trous de la même passoire.
C’est de cette boue que nous essayons de nous démettre. L’énergie est colossale qui nous permet encore d’être accrochés à la joie des enfants à travers la multitude des premières fois qui ont lieu chaque jour.
De même, toute lassitude s’essuie d’elle-même dés que nous entrons en contact avec les herbes, les terres et tous les animaux qui habitent notre présence.
Nous devenons fulgurants dans le rayonnement des êtres premiers…

14 - Don de l’esprit de troupeau

Il y a sûrement à ne pas hésiter dans la radicalité qui nous vient comme une caresse face à la brutalité policée de l’accumulation.
Se balader lentement le long des routes vicinales avec ce déhanchement nécessaire qui dit clairement sans l’énoncer ce qu’il est pour nous des lignes à grandes vitesses, des obligations compulsives du tourisme international, de notre irrémédiable attachement au spectacle permanent.
Une brève altercation du troupeau quotidien peut sans doute servir pour continuer d’être aimable avec le passant indifférent qui se trouve être parfois votre ami, votre voisin ou votre père…

15 - Don de la pâture

Nos genoux étaient cagneux. Nos tibias souvent remplis de bleus. C’était le soin apporté à la terre. C’était le temps des tartines partagées avec tous les petits animaux. C’était la pâture ou paissaient les vaches, où nous valdinguions en dévalant comme des furies.
Le temps à ramasser les patates en communion avec tous les gars et les filles, aussi, pour quelques sous bien-sûr. Les sacs de jute, la terre, les lignes d’enfants à travers les champs ; et le genou sacré qui nous associait tous !
Plus tard, il y aurait la genouillère du terrain de sport qui dirait tout. Du basculement. Mais en attendant, nos genoux touchaient la terre ensemble.

16 - Don de celui qui est déjà parti

Comment nos visages ne cessent de nous échapper ? Quel est cet étrange en face de moi, ce reflet dans la glace ? Parce que les miroirs réfléchissent trop et que cette réflexion m’amène toujours à un autre censé être moi.
Et que dire des portraits ? Et que dire des photos ? Une éternelle dérobade. Comme si le visage était cet éternel indien qui file dans les arbres dès que les cliquetis des appareils évoquent ceux de la gâchette facile qui le décima tout entier.
Nos visages jamais ne se laissent prendre surtout par nos propres yeux. On dit que les traits du vieillard marquent enfin la véritable nature de l’être qui toujours par des chemins secrets ramènent à ceux du bébé. Et qu’entre ces esquisses planent les yeux clos de celui qui est déjà parti…

17 - Don de la rue

Nous vécûmes au milieu des vieux quartiers d’enfance à nous régaler des petits plaisirs de la rue. La rue, ce si petit mot pour un pays si grand.
La rue que nous préférions au terrain pour nos jeux d’aventure. La rue à taper dans la balle et les voitures s’arrêtaient, attendant la fin du jeu. Non, ça n’était pas le bon vieux temps ! C’était la bonté du temps, simplement.
Avant qu’il ne se numérise, le temps était circulaire, et l’on pouvait toucher ses cercles. Le sable, l’eau, le bois, le plâtre, la terre, la pierre, le jardin, les lapins, la tinette, nous avions tout sous la main et le droit d’y toucher !

18 - Don du chat

Qu’est-ce qui dure si peu et nous obsède tant par de là les missives et les rictus du jour passant ? La lumière sur les tuiles au coucher du soleil, la blancheur du petit matin, la goutte sur le brin d’herbe, tous ces temples qui nous relient si nous laissons faire les éléments qui nous façonnent.
Il y a irrémédiablement comme une odeur de sainteté à vivre sans compter et sans conter, mais laisser les mots à l’intérieur pencher avec leur grâce habituelle comme les peupliers quand ils frissonnent.
Et vivre en lapant son rêve. Un chat en fait tout autant quand il s’étire.

19 - Don d’une question pendant la toilette

Le problème n’est pas l’obésité physiologique, mais l’obésité intérieure. Le problème est de savoir comment faire couler toute cette graisse-là !
Ainsi me parle mon enfant adolescent en se lavant, ce matin-là. Je le regarde avec ses longs bras et ses yeux toujours étonnés. La lumière est douce à cet endroit exact.
On pense évidemment envers et contre tout ce qui fait notre pays aux barricades de la révolte, aux tumultes populaires, à l’implosion qui sidère la belle société, qui fait comme à chaque fois que le pouvoir du rhinocéros s’en va par la petite porte sans faire un bruit. Mais on ne dit rien !

20 - Politique du 7 (janvier)

Dieu me tripote !
J’ai un chat dans la glotte
Un ticket pour le cinode
Ne pas oublier le Da Vinci Code !

Dieu me tripote !
Mon popotin a la côte
Un p’tit cachou pour le vioque
Son ciboulot qui débloque !

Dieu me tripote !
Il me fume la pipe à la coke
Ca sent l’eau bénie qui gicle
Le lis à la fin de son cycle !

Dieu me tripote !
Un petit caillou dans ma botte
De guingois sur ma verte route
Du vent s’engouffre dans ma boite à prouts !

Dieu me tripote !
Je sais bien qu’il a la côte
Voudriez-pas qu’il me défonce
Un’ p’tit’ couronne tout en ronce !

Dieu en robe blanche !
Main dans ma main se déhanche
Les paroissiens médusés
Devant cet homme avisé !

Dieu en cloque !
Celui qui veut nous tricote
Des petits chaussons bleus et roses
Pour des jumeaux, ça s’impose !
Des petits chaussons verts et blancs
Pour des jumeaux également !

Allah et Jahvé nous tripotent !
Ca fait pas marrer tous mes potes
C’est là, la raison très précise
Pour laquelle je m’éternise !

21 - Politique du papier toilette

Le papier toilette ce n’est pas fait pour la toilette
Même si c’est parfumé, mais c’est fait pour s’essuyer
Quand on vient de vidanger !!
Le facteur qui apportait des lettres
En descendant de sa mobylette
J’ai vu qu’il était tout mouillé
Au lieu de dire essuyez donc vos pieds !
Je lui ai dit, ah ce qu’on a ri…
Faites donc la toilette à vos souliers !
Le facteur a tiré sur sa moustache
Moustachu, moustachon
Je n’aime pas les petits garçons
Mousse qui tousse, mousse qui tache
S’est transformé en apache
Si toi prendre serviette comme paillasson
Moi prendre ma mobylette comme canasson

Un plumeau sur sa tête
Et sa serviette en peau de bête
Un apache sur sa pétrolette
Ça peut plus distribuer les lettres
Ça fait du tam-tam en cachette
Le facteur est devenu zinzin
Comme ils disaient, tous mes voisins
Faut chercher le grand manitou
Ou bien l’enfermer chez les fous

Dites-lui donc qu’il passe à mon cabinet
Pour faire ses besoins
J’ai demandé avec soin
Mousse qui tousse, mousse qui frise
Frousse au chocolat, flip à la vanille
M’a transformé en petite fille
M’a dit que j’avais l’air un peu tarte
J’en avais gros sur la patate
Voilà le sort bien attristant
Des enfants désobéissants
Qui à défaut d’avoir plus de sous
Préfèrent avoir une tête de sioux…

22 - Politique des pics de pollution

Peaux Cataleptiques
Maux apocalyptiques…
Des gaz, des gaz, des gaz
Ou je te karcher !
Sa phrase, sa phrase, sa phrase
Il ne l’avait pas payée bien chère !
Pourquoi, pourquoi, pourquoi
On ne retient que le petit rat !
Pourquoi, pourquoi, pourquoi
Un roi parle comme ça !

Oh, mon Manu, mon Manu, mon Manu
Dois-je dire : vous ou tu ?
Tant de victoire et de gloire
C’est le macaron du pharaon
Pourquoi, pourquoi, pourquoi
Uberiser tant de petits filous ?
Pourquoi, pourquoi, pourquoi
Tant de banquestères et de voyous ?

Français, française, français, française
Pour nous mettre à l’aise
Français, française, français, française
Veux-tu que je te baise ?
Française, français, française, français
Je vous ai compris
Française, français, française, français
Il est petit, tout petit ton kiki !
Il est petit, tout petit ton Q I !

23 - Politique de l’extrême centre

Mais que nous ne sommes ni de droite, ni de gauche ! Mais que nous sommes d’en bas, et maudits par ceux d’en haut, puisque de guerre, il en fut toujours question ! Qu’il n’y eut jamais aucune interruption tout en faisant dire par la bohème intellectuelle de service que le peuple était mort en même temps que Marx !
Et que l’ouvrier serait définitivement remplacé par les machines et les artistes ! Jusqu’à ce que toute trace soit oubliée, comme si la disparition du cadavre était impérieuse pour que le crime soit parfait ! Ne soit jamais même évoqué !
L’appauvrissement général de la planète est au programme ! Pour ceux qui possèdent les pays car il faudrait un jour en parler, la folie et le ravage sont des régulations intéressantes et non négligeables pour l’équilibre général de la transaction journalière ! Alors que voulez-vous que ça nous fasse d’être à droite ou à gauche du maître de cérémonie pour dire comme hier que nous voulons sa tête, rouge si possible et détachée de toute royauté !
Alors la droite et la gauche aux oubliettes, nous restera l’extrémisme à peine dissimulé de tout temps par les soit disant centristes ! Il est possible alors que leur modération ait totalement disparu ! Transformation totale !!! Miaou !!!

Vacance de toujours

Belles et Voyages [*]

[*] Besoin de voyage, évidemment ! Changer de paysage…
Même en chaussons dans l’immobile presque éternel de nos vies !
Les personnes voyageuses, elles, s’enfuient toujours de leur pays et nous font signe…
Vous, magnifiques migratrices ! Sans vous, que serions nous ?

Nous, voyages, colifichets, calembour au kilomètre
Coriaces dévoreurs d’opprobre
Couteaux qui ont toujours besoin de tranche
Traîneaux sonnant au loin sur la neige d’été
Coulées de lave dans le glacis d’amour…
Nous, califourchon sur la mer des sarcasmes
Coulée de bronze dans la prairie altière
Colibris dans l’océan pléthorique des habitués du désastre
Capharnaüm cavalier des oiseaux du transit estival
Ridicules insectes grillés aux vents d’autan…
Nous, câlins magnifiés dans l’aile du rapace
Piverts étanches soutenant le ciel d’insouciance pareil à nul autre devant nous qui sécha la terre, le bois, l’être occupé de son quotidien, voulions nous en remettre à vous…
Vous, belles personnes qui parcourez la terre et la route et la plaine, et le pays d’ici comme là-haut ou là-bas, dans le plus simple appareil qui vaille…
Encore que la nudité ne soit pas tout dans ce pays de grande apparence et de grand falbala…
Vous, mieux disantes et mâles vertus de la bourlingue
Que n’avions-nous jamais accompli l’acte de la bienveillance sans souci du possible ou de l’imaginable…
Mais simples d’esprit et de corps d’accompagner l’autre dans son geste et dans son soliloque avec l’univers
Avec l’aile du cauchemar, avec tous les animaux de l’arc-en-ciel…

Là-bas, si j’y fuis

Va voir là-bas si j’y fuis
On se sent si mal ici
Qu’on voudrait bien se barrer du bercail
Du vieil Eldorado qui s’écaille
(que dans le bruit de la moto de monsieur Mermet
Il y-a enfin quelque chose qui nous plait…
Il y-a enfin quelque chose qui nous redonne un peu d’air frais)

Vous vous rappelez : pour en finir avec la crise
Ça retournait sévère sa veste et sa chemise
Et quand le vieux coco de nous dire
Maintenant, faut se retrousser les manches
Alors nous on s’est dit :
Mais où sont passées nos vieilles grimaces
Dans leurs chemises, leurs têtes elles dépassent
En 89 quand la gauche s’est mise à bouffer tout son œuf
Qui c’est qui l’a dit sans le dire : moi je m’en viens vous faire du neuf
Cette émission pas banale qui nous soufflait comme un bluff
Et qui chantait…

On n’oubliera pas non plus monsieur Mouna, le cycliste utopiste
Colportant sur tous les toits, ses colères pacifistes
Ni les enquêtes modestes et géniales de monsieur François Ruffin
La vie des gens et des surveillants dans l’hyper Auchan tout près d’Amiens
Ce diablotin, ce chérubin qui nous sifflait son refrain
Et qui disait…

Tant les échappées en Inde en Russie, aux Etats Unis
Pour dire que le chaos, c’est là-bas comme ici
Tant la vie du balayeur africain de radio-France
Nous invite à bricoler nos vies comme des transes
Nous invite à bricoler nos vies comme des errances

Le cratère à la gorge [*]

[*] Quand j’étais petit, les vacances, c’était juste sortir la table pour manger dehors sous le chèvrefeuille à la fraîcheur des nuits de juillet. Pas de vacances pour mon père qui hurlait dés que Pompidou apparaissait à la télé. Il devait travailler plus (!) pour simplement survivre encore quelques temps dans sa petite ébénisterie. On nous avait dit que nous venions comme tous ceux du village d’un vaste peuple nomade qui fabriquait des paniers et qui s’était installé autour du château…

Bénignement, il chouine devant la sucette du succès
C’est juste un air de plainte pour rien, comme un regret
Il aurait été commode d’être reconnu comme un people
D’être managé, d’être overbooké comme le lait dans la casserole
Descendre de sa montagne de grand orgueil
Chevaucher savamment sa belle sous l’œil hagard des bouvreuils
Sentir la honte et puis la foule devant le sodomite
L’araignée qui tricote et la mouche qui lave la vitre

Mais nul ne saura ce qu’il fabrique
Ni la ménagère, ni le vieil ado, ni le cadre dynamique
Il reste attaché à sa vieille pelure d’orange
Il est cette petite fourmis et que nul ne le dérange

Je n’aimais pas petit entendre l’alerte à incendie
Il me semblait voir à nouveau la guerre faire ses petits
Toutes ces villes partir en fumée comme autant d’artifices
Le regard lubrique de la foule pour tout crime pour tout supplice
Et c’est mon père qui était autrefois marchand de chaises
Qui un jour par grand beau temps m’avait vraiment mis à l’aise
Le monde est ce beau fruit bien sur qu’il te faudra croquer
Assied toi dehors et passe à table devant la belle nappe d’été
Il savait qu’il n’irait pas longtemps du côté des nantis
Que le monde conforme a toujours son petit côté pourri
Qu’il est urgent de se mettre en colère ou un cratère à la gorge
Pour qui chantent ce matin le pinson et le rouge gorge ?

Vacance d’été

M’étirer L’oiseau Comme Jamais [*]

[*] C’est un paysage de bord de mer. C’est une marine. On entend le bruit de l’homme quand la marée vrombit ; le bruit de l’oiseau qui s’étire au milieu du silence des baigneurs et de la caravane publicitaire. Plus loin à quelques pas de l’autre coté de la montagne : Barcelone qui ronronne et son musée du peuple.

Nous vivions allègres en contemplant la mer calme et vierge dès le matin… Nos vies étaient aussi simples que les enfants de la plage. Seule, la pâleur des voiles nous distinguait d’un autre jour.
Nous méfiant de nous mêmes comme on nous l’avait appris, nous figions nos cœurs vers des hauts mâts toujours en balancement. Mieux qu’un cormoran, un homme au corps d’albâtre à la musculeuse charpente s’essayait à plonger, batifolant dans l’écume comme un dauphin rieur.

Et je vis ma fiancée torride au sourire intense, aux mamelons tout ronds m’étirer l’oiseau comme jamais elle ne fit… Nous filions d’algériennes siestes que la stupeur touristique venait de temps à autre interrompre. Et je bramais si fort, au dessus de la voix annonçant les spectacles du soir.
Nous avions choisi de nous enfuir vers des plaisirs parfaitement licites avant de nous rendre dans la javel des rêves. Et nos rêves comme autant de pelures qui nous protégeaient de la torpeur des jours à venir…
C’étaient des temps de configuration intensive où l’être se perdait dans le néant des vents d’ouest. La massification du nous, foules hébétées par la vacance consumériste nous faisait cheminer vers les cliquetis définitifs du chaos.

Le Musée Du Peuple

Villes factices parfaitement reproduites à l’identique. Touristes de nos propres vies, contemplant nos places de villages et nos coutumes comme des ethnologues.
Hôtel de la visitation au musée du peuple. C’est un petit cercle de rues enchâssées où nous pouvons admirer de vieilles brodeuses… Nous filons à l’anglaise entre les œuvres de grands maîtres, essayant l’invisible comme posture centrale au milieu du siècle du tout pour ma grande gueule…
C’est l’apologie du rêve américain : tout le monde dit « I love you » dans un décor de vacances entre deux chevaux et Cadillac. Tout le monde poursuit sa route 66 et se plait à répéter 666 devant le premier calviniste appuyé sur le décor en vrai de ses années Elvis.
Et puis ricanons, ricanons tant qu’on peut. Que verrons-nous encore de nos vies quand le formol de la cupidité nous aura définitivement absous de l’idée d’aller vers l’autre ?
Combien serons-nous encore à nous insurger pour dire que le spectacle donné par la mise en scène de nos vies est toujours aussi pitoyable que le chacun sa maison, chacun son confort… Et gloire au plus fort !!!

Travailler Moins [*]

[*] Avec les amis de la Balayette, nous avons fait toutes sortes de « Rêveries » ouvertes au plus grand nombre… La dernière fut la plus folle qui permettait dans un site classé de notre ville de faire la sieste collective dans un environnement revisité par un groupe de décorateurs dont l’unité architecturale était…le transat. Danihel Béguin dont l’œuvre fut pour une partie importante, consacrée à cet objet ô combien symbolique en fut le maître d’œuvre. Que ces mots et cette musique lui soient dédiés…

Travailler moins
Pour aller loin
C’est bien.
Et siester plus
Pour rêver davantage
C’est mieux.
Même pas pour fermer les yeux
Même pas tout seul dans son pieu.
Mais dans des transats
Ou des hamacs
C’est bath
Et tous ensembles
Il ne faut presque rien pour que le pouvoir tremble.
Et ça lui ferait du bien
À celui d’aujourd’hui
De trembler un peu !
Siesteurs de tous les pays,
Unissons-nous !
Le jour de Rêve est arrivé !
Rêvons par tous les bouts !

Rêve Général pour les femmes
Les enfants et même nous !
Drôles de grands méchants loups
Crevés, sur les genoux…
C’est tout !
C’est tout…

Vacance d’hiver

Itinéraire d’un enfant gâté de Picardie.

Étape 3 : dans un parc à Abbeville, ville célèbre pour ses maisons dites hantées ; mais ce jour là balade au sein d’une exposition de photos géantes.
Étape 2 : on va se baigner, mais pas n’importe où ; dans la grande piscine de l’Aquaspace.
Première étape : dans l’Aisne à Guise, un musée tellement précieux qu’on prend tout son temps avant de s’y rendre.
Les vacances sont presque finies, on se doit de faire son devoir de vacancier comblé.

Chez Mon Sieur Godin

Nous filtrerions l’improbable au travers de nos muscles flétris par le temps et les alizés nauséeux. Pour la devanture, nous passions chaque jour la balayette et le chiffon au bout de grandes perches qui nettoyaient le ciel, rompu à l’azur bleu de porcelaine.
« Tout ce que tu nidifies est amour » braillaient les scarabées. C’était la fin de l’été aux bistrots du centre et les radios chantaient l’amour à tout va entre les pubs ; et tous les mamans-papas préparaient la rentrée dans l’agitation des caisses.
Il faisait doux encore pour la saison et nous au lieu de rentrer, pour suivre pas à pas, l’angoisse de rigueur diffusée par le sérail des argentiers médiatiques, nous plaisions à nous égarer dans les moustaches de l’archiduc de Guise afin qu’il nous concocte quelque nouveau phalanstère à nous carrer dans les brumes de ces temps épiques…
Oui, car s’attarder au Palais Social, c’était Versailles avec tous nos pères les communeux, avec toutes nos sœurs et frères qui s’agitèrent pour les bords de mer en 36, tous les chemineux immigrés aussi dont la tête explosa sur les grilles de Charonne ou dans les fonds de Seine !
Nous traversions ainsi des corridors, des buanderies, des pavillons où l’air et la blancheur de la lumière semblaient nous appeler à l’heure des combats avant que le monde ne dérape, à l’heure où mon sieur André Godin nous chauffait plus que mon sieur André Citroën.

La cafétéria de l’Aquaspace

Dans la cafétéria de l’Aquaspace, le mobilier est très rouge abrasif. Le siège dessin sur lequel le corps papier s’appuie est silencieux… et le serveur vieil élève dans la garde du parking à caddys fait vibrionner sa mâchoire de poisson dégluti.
La commande en café, sodas ou autre cake déraisonné.
Par les lointaines sidérurgies de l’horizon agro-alimenté peut se passer par le simple clignement d’yeux… Le garçon ne vous sert pas toujours avec son grand plateau à bordures très molles tandis qu’un baigneur s’ébroue dans les travées des armoires à canettes.
Chaque client a les yeux perdus dans l’eau delà du simple nageur : cette courbe d’épaule qui ruisselle, l’ondulation du plongeur au dessus du ressort ou l’œil exorbité dans la lessive à grandes battoires du crawler de fond et qui s’ébroue dans l’écume du jour.
Les cris rafistolent les vieux enfants virevoltant dans les arcs-en-ciel de plastique fluorescent tandis que des groupes de mamans en gros bonnet fuchsia font flotter leurs beaux seins goûteux au dessus des fontaines à bulles…
Le bain est très chaud et même derrière la vitre, le client perçoit les soubresauts du corps affolé de plaisir et rendu dans son immobilité d’apnée par l’œil fétide du maître de bassin perché sur son grand escabeau…Tout ça se chante dans la cafétéria de l’ Aquaspace où il ne fait jamais ni froid, ni chaud…

Un parc à Abbeville

C’est des oiseaux accrochés dans les arbres. Le parc en est plein qui se déploient, qui mugissent et tricotent avec le vent. Ils sont plus que bicentenaires pour certains qui vont chercher loin dans la terre, les ressources premières…
On se sent bien dans les parcs ou dans les bois. Les forêts aussi bien-sûr, même si elles sont un peu trop bien élevées. Tellement bien ratissées. On s’y perd. Mais voyez vous, on s’y sent respirer. Comme disait Germaine, les arbres sont presque tous gentils.
Les oiseaux, c’est pas pareil. Dans ce parc là, ils sont énormes, sur des posters accrochés aux arbres. Mais à bien y écouter de plus près, ils sont tellement absents. C’est un silence de photographe où seule la lumière vibrionne. Seul aussi, un petit moineau de rien et muet picore le bord du cadre. Il faudrait certes qu’il le picore tout entier pour qu’il devienne à peu près aussi visible que celui sur la photo. S’il le faisait, on sait que certains de ses congénères se remettraient à chanter. Et de très près, on le verrait… C’est le fantôme, celui du chevalier De la Barre qui nous revient, sa chanson des Grands Arts. Sa langue, ses os et son Voltaire craquettent et brûlent comme au siècle des Lumières…Le marchand de forêts qui s’occupe du parc lui aussi à sa manière est photographe. Sauf qu’on s’y trompe. Il plante un peu de forêt en ville. Nous on y croit !

Les Hortillonnages [*]

[*] Fantôme chevalier à large chapeau d’Abbeville ou photographe d’Amiens évadé des camps de la mort. Mr Delabarre, Mr Pelozoff !!!
Autant d’images d’espaces reflets dans le silence des arbres et de l’eau et des animaux… et qui nous fit chanter moi comme celui qui se tut en moi.

Les baignades au creux du paysage verdoyant, les barques, les passerelles et les jardins resserrés derrière le bien-fondé de leur clôture.
Les grands arbres, les reflets au dessus des nénuphars, les canards colverts tout au long des hortillonnages. L’odeur de vase et de saules pleureurs qui trempent dans les bras de la Somme !
Nous arrivons dans le rieux de l’Abreuvoir où derrière les impatiens, des enfants préparent l’apéritif et le feu… Derrière les cabanons des tourbières, des jardins luxuriants trônent au milieu des îles comme de discrets paradis gagnés sur les marais. Le bateau avance sans un bruit dans le silence des eaux à proximité des urbaines raisons…
Plus loin, la balançoire abandonnée derrière le céleri, l’amarante et le mouron. Les jardins sont rachetés, les destins courent le long des parcelles. Des épouvantails pour nous le rappeler ; les propriétaires protègent leur berge une fois la barque arrimée.
Bordures de capucines et champs de citrouilles, le petit vent du soir plane sur les surfaces d’eau. Nous glissons devant la guinguette du vert galant où s’enfuit une petite colonie de rats musqués au milieu de la rumeur des touristes. Quand le batelier nous demande de nous lever devant le jardin vainqueur, un héron cendré nous salue dans son immobilité…

Le jardin paradis [*]

[*] On est plusieurs à l’intérieur. Ce pourquoi « je » est sûrement un autre. Mon nom n’est sûrement pas celui auquel vous pensez, bien que par ailleurs je lui ressemble presque fidèlement. Nous sommes ensemble entrés au jardin-paradis boire un coup chez des amis. Nous avons aussi mené bombance sur des plateaux de cinéma au côté de Peter Falk ou autre transparent, puis dans des chambres de soins palliatifs, des routes qui n’en finissent jamais. Oui, je suis au milieu du rond-point et j’ai des ailes dans le dos.

La chaise longue trône à côté du transat venu du fond des âges au milieu des pommiers et des poiriers. La table d’été prospère sous la tonnelle de glycines où la maîtresse de maison a délicatement posé sur la nappe cirée son délicieux crumble aux mirabelles.
Les ombres s’esquivent entre les tilleuls et les pêchers après la tonte des kiwitiers : l’artiste du vallon, le contrôleur des plaines va chercher la vieille ficelle de valeur dans sa boite en bois brut pour faire des fagots qui tiennent avec toutes les branches des arbrisseaux ; elles envahissaient le voisin dont l’âne braye à tue tête pendant que nous terminons les nœuds. Nous les posons à côté des grands sacs de papier où folles herbes et feuilles séchées emportent avec eux quelques grillons ayant chanté les soirs de lune sous les grandes pâles de l’éolienne presque muette…
Les arbres ont grandi autant que les enfants et quelquefois plus hauts que la maison refaite au lait de chaux. Les arbres se souviennent aussi des amis qui leur avaient fait faire le voyage et c’est un peu pour ça qu’ils donnent autant de fruits.
Derrière le jardin paradis, toute une communauté de vie dont Eve fait partie. Et sur la plate-forme montée à la cime du grand merisier, plus d’un amoureux s’est laissé aller, emporté par la caresse des nuages…

Vacance intérieure

La bobine et le râteau [*]

[*] Mettons que le couloir intérieur de nos vacances se déroule sur un plateau magnifique où se rencontrent des génies : Charlie Chaplin, Jacques Tati, Wim Wenders, Pina Bausch, et… Thierry Loiseau ! Photos !

Tourne la bobine plus loin que la Chine
Le rêve est Lumière tout comme les Frères
Tourne la bobine la pellicule fine
Dans le clair du film, on voit monsieur Chaplin
C’était donc ça, les temps modernes
Le binaire, le 1-0, le rêve en berne
Les religions dans le trou du fion
L’apocalypse, Hiroshima, la solution…
Tourne la bobine plus loin que la Chine
Le rêve c’est la bande-son que tu entends tout au fond
Tourne la bobine, la pellicule fine
Il grommelle, il grogne, il crie, et c’est monsieur Tati
C’était enfin les vacances de Monsieur Hulot
Qui court après le temps dans sa petite auto
Dans sa maison de pension où l’on fait bien attention
À ce que les enfants soient rois et les adultes pions…
Tourne la bobine plus loin que la Chine
Le rêve n’est pas une science mais une déficience
Tourne la bobine, la pellicule fine
Fauteuil à la renverse, voici monsieur Wenders
C’était donc çà, les ailes du désir
Tu souffres en silence et tu prends ton plaisir
Au dessus des toits, on voit l’anonymat
Des râteaux en armées, des parabolisés…
PS : le dictateur, the Kid, l’école des facteurs, jours de fête,
Pina en 3D, l’angoisse du gardien de but au moment du pénalty.

Le crabe [*]

[*] C’est un crustacé sympa qui marche de guingois et sans se presser et en même temps, c’est tout un espace du spectacle des vacances immédiatement dessiné avec ses lunettes, ses parasols, ses bouées et ses kilomètres de corps allongés… Faut-il faire un si grand pas de géant pour en arriver à la maladie qui vous cloue au lit d’hôpital définitivement et qui fait de vous l’éternel vacancier ???

Il a chopé un crabe en plein cœur
Et voici que sa vie se met à glisser comme du beurre
Il a chopé un crabe à pleine gueule
Et voici qu’à pleine bouche, il embrasse le monde et le dégueule
Oh la la la, la belle matrice que voici
Sur laquelle je m’échine et je me plie
A plier pour qu’au tréfonds de ma tuyauterie
Le poisson-chat n’attrape jamais la souris

Il a chopé un crabe en plein ventre
Et voici que le malin le charrie dans son antre
Il a chopé un crabe en plein foie
C’est finalement le timbre sur la vie qu’on avale qui fait foi
Oh la la la, où est la lumière qui s’en fut
Dans quelle allée ont piétiné tous les déçus ?
Tu t’es penché au dessus du fleuve des mondes disparus
Et tous ces visages au fond du ru, ce que tu as vu, tu l’as vu

Il a chopé un crabe en plein zob
Et la vie de ses contemporains comme celle des microbes
Il a chopé un crabe en plein capital
Et ses bourses et ses trésors de guerre lui furent fatals
Oh la la la, la belle vie pleine de roses
Au dessus du cercueil, tourtes ces voix qui se causent
Oh la la la, la belle éternité qui nous tracasse
Pendant ce temps, Mr Blingbling, ses actionnaires se décarcassent

Les vacances de l’ange

Jusqu’au lendemain, je boudais l’astre mort et son turn-over. La nuit, tout se mettait à chahuter, et quand au matin, les murs retournaient à peu près à leur place, c’est les oiseaux en fanfare qui braillaient à tout va devant la fenêtre.
Ouais, bon… ça sentait le printemps (ou l’été)…pas une raison pour nous empêcher de dormir !
Tu disais je kiffe la nuit avec toi en shootant le petit matin dans une canette de coca esseulée sur une grille d’arbre. Je te prenais par les épaules en te racontant l’histoire de l’ange en vacance qui met son doigt au dessus des lèvres de l’enfant pour lui apprendre le secret.
Je t’envoyais du salpêtre dans le dos sur le manteau pour que tu paraisses être d’époque vraiment. Un ange bien dans son temps faisant du stop au milieu du rond-point, l’un des 450000 de notre bon pays, si généreux, si bon payeur coté carrefour organisé.
L’ange disparu sous l’œil scrutateur des caméras de contrôle, toutes les religions s’affolaient : c’était des nuées d’insectes qui dévastaient les yeux des uns, dévoraient les cœurs tendres, les transformant en autant de signes durcis devant le miroir sans teint des fanatismes de tous genres.
En même temps que penser des modérés se dorant la pilule sous leur vie si raisonnable et tristounette ? Si ce n’est le fameux truc du… Ouais bon, ça sentait le printemps…

Ainsi parlait Thierry L’oiseau [*]

[*] C’est l’histoire d’un ami qui est toujours un peu là et pourtant déjà si loin. Et c‘est l’origine du monde bleu… Celui qui permet toujours de revenir aux belles et au voyage…

Nul ne m’assignat de l’endroit où je devais aller. Comme tout grand voyageur, des Huns jusqu’à Théodore Monod, j’affectais autant le monde des objets que celui des animaux. J’aimais à me promener une plume dans mon chapeau. Une dent d’ours ou de puma attachée au bout d’une ficelle sur ma poitrine douce.
Comme tout grand voyageur, c’est le tableau de nature morte qui nous emporte d’abord : un cadre de fenêtre, un faisceau de lumière, quelques miettes et le petit gobelet de métal fin qu’on mettra à la fin dans la poche pour rejoindre les grands paysages. Nature morte aussi que sont les immensités de sable et d’eau.
On ne voyait pas non plus différemment le grand bazar céleste qui nous surplombe. La lune était ma copine morte depuis longtemps et qui continuait toujours à nous faire de l’œil… Quand à Vénus, Mars, Orion, Belthégeuse, ils scintillaient de tous leurs feux grandioses à peu près pareil que la petite guirlande enroulée en pelote à côté du sapin au-dessus de la loupiote que j’allume le matin pour me raser lorsque le soleil dort encore et que je dois prendre la route.
Après seulement vient le monde des animaux et son cortège doré des chasseurs monochromes. Toujours depuis Nemrod, les mêmes êtres dans une éternelle fuite piétinent ils à l’autre bout du monde. Montagnes, déserts, océans, effacez-nous afin que ceux qui vivent indéfiniment dans le même pays, puissent respirer…

Vacance / Philox…

Vacance de toujours

1 - Belles et voyage
2 - Là-bas si j'y fuis
3 -Le cratère à la gorge

Vacance d'été

4 - M'étirer l'oiseau
5 - Le musée du peuple
6 - Travailler moins…
7 - Chez monsieur Godin

Vacance d'hiver

8 - Dans la cafétéria de l'Aquaspace
9 - Un parc à Abbeville
10 - Balades en hortillonnages
11 - Le jardin paradis

Vacance intérieure

12 - La bobine et le râteau
13 - le crabe
14 - les vacances de monsieur l'Ange
15 - Ainsi parlait Thierry Loiseau

Prélude à la « Vacance »

1- (de vacant, « absent ; oisif ») au pluriel, vacances… 2- (de vacant, « libre, vide »)… » Dictionnaire Le Petit Robert…
Après avoir abondamment mis en scène plusieurs de ses « vies minuscules »-pêcheur de lune, marchand de boutons et autre allumeur de réverbère- , après avoir témoigné de sa rencontre avec les bateliers de l’Oise et de tous les points d’eau qui y convergent, Philox nous propose à présent d’aller prospecter du coté du souvenir impérissable de vacances et du besoin de voyages comme autant d’utopies désignées et de chemins d’expériences réalisées…
Il s’agit ici de dresser une carte des lieux de plaisir spécifiques reliés au temps libre et au besoin de jouer, de s’émouvoir dans des espaces typiques de régions précises: l’Aquaspace à Beauvais, les Hortillonnages à Amiens, le Familistère Godin à Guise, le Musée du Peuple à Barcelone. Il s’agit aussi de témoignages sensibles et nourris de nos fantasmes collectifs sur des espaces généraux toujours reliés à nos temps libres : le bord de mer, le parc ou le jardin bienfaisant, le voyage à l’étranger comme une main tendue vers les nomades, voyageurs éternels…
Il s’agit enfin de peindre une ambiance d’ensemble propre à tout l’espace du temps libre et du loisir dans laquelle la radio, et l’ensemble des écrans successifs, le cinéma ou la maladie sont omniprésents en temps que médium comme en temps que domaines. Les suspendre dans une critique radicale et les relier aussi à l’étrangeté de souvenirs sensibles et personnels qui les irradient de ce parfum de voyage et de paix et caractérise si fort le temps de la vacance estivale… hivernale ! Voir enfin intérieure et de toujours !
Paroles, musiques et chants : Philox
Sauf musique 6 : Jérôme Jasmin
Guitares, oud, ukulélé, cistre & arrangements : Jérôme Jasmin
Accordéons, accordina, claviers & arrangements : Philippe Mallard
Contrebasse : Fabrice Leroy
Percussions, trombone : Fabrice Thompson
Violon : Jean-Baptiste Frugier
Prise de son et mixage & arrangements : Mathieu Marietti
Enregistré à la Maison de la Balayette du 24 au 29 avril 2011
Mixé au Studio Agen en juin et juillet 2011
Mastérisé en août 2011 par Bruno Gruel pour Electra Mastering
Photos et livret : Pascal Valu
Visuel principal sur une œuvre de Danihel Béguin
Intitulée : «  Réservé à Alberto G. » réalisée en 2005
Remerciements à ses enfants : Nicolas et Mathilde
Avec le soutien de :

La ville de Beauvais
Le Conseil Général de l’Oise
Produit par la Balayette à Ciel

Origines et métamorphoses

1 - Origine de la roulotte

Et ce même confort qui écraserait les bienveillants de sa chape de plomb définitive parviendrait-il à conduire le silence qui fait qu’au printemps l’épouvantable épouvantail secoue ses plumes sous les oiseaux éberlués ?
Pourquoi nous nous mîmes en route ?
Y-avait-il une raison ?
Ce cheval et cette roulotte attachés à notre enfance, avaient-ils la force de traction pour nous arracher à la monotonie des industries compatissantes ?
Que s’était-il passé pour qu’autant de jeunes gens questionnent l’inquestionnable ?
Et ce qui ne se questionne pas, valait-il qu’on s’y arrête à ce point ?
Quelle folie avait soudainement pris tant d’enfants atypiques pour dire d’une même bouche que le roi était nu autant que l’objet industriel était poison, muté par son principe de production ?
Qu’importe si nous poussions notre logis aidant notre cheval dans les côtes, autant que nos muscles nous y autorisaient, mais combien serions-nous la nuit à dormir dans la paille, tout émoulus par l’éveil de nos sens et l’indiscrète frayeur des jours à venir ?
Et combien serions-nous à rester éveillés, la nuit venant, à la lumière de la lune, projetant devant nous l’image de jeunes vieillards à genoux devant le confort high-tech de consoles et de diverses autres babioles à emporter dans nos poches ?

2 - Métamorphose de la docilité

Quoi ! Nous n’avons pas pu nous faire géants !
Et ce grand ours caché au fond du seau, que n’avait-il retenu en lui pour ne pas nous arracher un bras quand nous allions chercher de l’eau au lieu-dit de la Source, au centre exact de notre forêt des rêves !
Et cette force colossale cachée au fond de nos jambes !
Oh que nenni !
Avions-nous dit, quand certains résistants allongés sur la mousse avaient insinué qu’elle était au service de la grande vélocipédie du capitalisme triomphant !
Oh que nenni !
Avions-nous encore dit, quand les chevaux hennissant dans leur épopée sauvage nous faisaient rougir de honte, abasourdis que nous étions par l’indéfectible obéissance à laquelle nous nous devions de rendre compte, chaque soir venu !
Allez ouste !
Fichez donc le camp, vieux démons de la docilité permanente !
Que notre route accomplie, vous vous miriez dans le miroir parfait de nos consciences gelées et qu’enfin puissiez prendre peur !
Oh ! Connaître enfin la frénésie des hurlements remontés du fin fond des corridors de vos cauchemars !
Et que sur l’échelle de soie accrochée à la chevelure mouillée des merveilleux nuages, tous les lapins, les belettes et musaraignes veuillent bien nous rattraper par la manche avant que nous nous enfuissions pour toujours !

3 - Origines des boules

Pourquoi à chaque nouveau solstice d’hiver, ces vieilles boules occupent nos gorges, insidieusement sans nous quitter jusqu’à la purge finale du calendrier de l’année ?
Sommes-nous si indifférents à nos émois, qu’encore une fois, il nous faille nous abandonner à la monotonie des pacotilles de réveillons ?
Et cet éternel obscurantisme qui nous maintient sur les parkings des grands magasins et des marchés bios ?
Combien de décennies, combien de siècles avant que les enfants ne se rebellent et ne jettent aux orties les papillotes obligatoires ?
Faudrait-il une si grande secousse pour que nous préférions le visage désolé des marchands asphyxiés sous leur pyramide de machin-choses à l’éternelle figure par laquelle nous renouons le pacte des cadeaux avec la conserverie des vieilles idées du néant ?
Comment fêter toutes les merveilles du Gui l’An Neuf lorsque nous savons par cœur comment nous signons chaque fois avec les symboles et les signes ostensibles, notre contrat indéfectible de soutien aux conservatismes éternels ?
Et comment dans ce merveilleux pays de la misère soufflant à l’échelle de la planète, pouvons-nous encore autant collaborer ?
Et renouveler chaque année, nos symboles de soutien ???

4 - Origines de la tristesse

Combien de routes un enfant doit-il faire avant de construire sa maison ?
Et combien de guerres faudra-t-il à ce même avant que sa joie ne s’éloigne ?
Combien de morts rangés dans ses valises avant de devenir beau ?
Pourquoi donc écouter ce petit vent malin sorti de bouches qui n’ont plus rien d’humain ?
Combien de fois l’oiseau doit se froisser avant qu’il ne rejoigne le ciel ?
Combien de fois un peuple est-il trompé avant que sa révolte ne gronde ?
Et combien de colères faudra-t-il à l’esprit avant que de blanchir la page ? Combien d’oreilles faut-il à l’homme heureux avant d’entendre l’autre pleurer ?
Combien de fleuves faut-il à l’âme humaine avant de panser sa tristesse ?
Et combien de vies faudra-t-il à l’erreur avant qu’elle ne sorte du lit ?